Réduire l’inflation grâce aux énergies renouvelables

Comme l’a dit Al Gore à l’ouverture de la COP 27 de Charm El-Cheik en novembre, nous ne pouvons pas choisir nos malheurs, mais nous pouvons choisir les bienfaits qui en résultent, notamment en ce qui concerne les énergies renouvelables. En effet, nous nous trouvons dans les premières étapes d’une révolution de la durabilité, qui aura l’ampleur de la révolution industrielle et la vitesse de la révolution numérique.

L’ex-Vice-Président des Etas-unis a également indiqué que chaque dollar dépensé dans les énergies renouvelables crée des emplois d’une valeur de 3 dollars, ce qui rend ces investissements massivement déflationnistes.

Le prix des énergies fossiles est volatil

Comme on peut le constater sur le graphique ci-dessous, le prix du gaz dépend de facteurs géopolitiques largement imprévisibles qui le rendent très volatil, puisqu’il peut passer de moins de USD 2 par million de Btu à plus de USD 14 en quelques mois. [ Le Btu est le British thermal unit; 1 million de Btu/hr équivaut à 293.07 kW ]

Il est donc impossible pour les consommateurs de prévoir le montant de leurs prochaines factures de manière fiable.

A l’inverse, le prix des panneaux photovoltaïques baisse de façon régulière depuis qu’on a commencé de les produire et a chuté de 99.6% depuis 1976 !

Au contraire des énergies fossiles, dont le cours monte lorsque la demande augmente, le prix des panneaux solaires baisse de 20.2% à chaque fois que la capacité installée double. On se trouve donc dans un cercle vertueux selon lequel plus le nombre de panneaux installés augmente, plus ils deviennent meilleur marché.

Les énergies renouvelables sont déflationnistes par nature

Plusieurs raisons font du solaire et de l’éolien des sources d’énergies intrinsèquement déflationnistes. Tout d’abord, ces deux ressources – le soleil et le vent – sont illimitées, ce qui empêche une augmentation des prix en raison de la demande. Par ailleurs, les énergies renouvelables sont avant tout « technologiques », ce qui rend possibles des économies d’échelle, des baisses de prix et des améliorations de rendement. De plus, le coût de ces énergies dépend essentiellement de l’infrastructure, avec des frais marginaux pratiquement nuls. Enfin, l’amélioration des technologies de stockage de l’électricité en améliore fortement l’efficacité car elle permet une utilisation 24h/24.

La combinaison de ces différents facteurs a permis une forte baisse du coût de l’énergie propre, qui est désormais inférieur – hors subventions – à celui des autres formes d’énergies comme on peut le constater ci-dessous.

L’attrait de l’énergie solaire est d’autant plus grand si on la considère non pas en simple valeur absolue mais en termes relatifs par rapport au gaz naturel qui a augmenté de façon dramatique.

Le prix relatif va devenir de plus en plus avantageux

Et cette tendance n’est pas près de s’arrêter. En effet, compte tenu des réserves limitées disponibles sur notre planète, la hausse des prix des carburants fossiles va irrémédiablement se poursuivre sur le long terme. Le même phénomène va s’observer en ce qui concerne le prix de l’électricité générée par les centrales thermiques. En effet, celles-ci ne peuvent satisfaire la demande, en raison d’un manque de ressources en Europe et d’une obsolescence du réseau aux Etats-Unis. Pour sa part, le GNL, compte tenu de coûts croissants de transport et de regazéification, ne devrait pas non plus voir son prix baisser.

Quelques nuages apparaissent toutefois dans ce ciel bleu. De fait, les réseaux électriques vont nécessiter d’énormes investissements pour améliorer leur fiabilité. Il faudra également augmenter la vitesse de transmission pour permettre l’électrification des transports. Par ailleurs, la variabilité de la production d’électricité renouvelable impose un stress supplémentaire aux réseaux électriques, avec des coûts par utilisateur qui vont augmenter au fur et à mesure que des consommateurs quittent le réseau pour devenir autonomes en énergie.

Des projets de plus en plus rentables

Compte tenu de cette évolution, les nouveaux projets en énergies renouvelables bénéficient d’un coût du capital plus compétitif et de rendements exigés plus faibles. Comme on le voit dans le graphique ci-dessous, cette évolution est l’inverse de celle des projets en pétrole offshore ou en GNL.

Qu’il s’agisse de l’éolien ou du solaire, la technologie est aujourd’hui arrivée à maturité et ces énergies vont certainement connaître une accélération de leur développement.

Une production de plus en plus décentralisée

Et cette accélération va s’accompagner d’une tendance croissante à la décentralisation, c’est-à-dire à la production de l’énergie directement par les consommateurs. En effet, deux facteurs contribuent à cette évolution. Tout d’abord, l’installation de panneaux sur les toits des particuliers et des entreprises – et donc la production décentralisée – fait l’objet de subsides ou de crédits d’impôt, aussi bien aux Etats-Unis qu’en Europe. L’objectif est de faire passer la proportion de l’électricité auto-produite à 20%. Aux USA, la loi IRA va accélérer l’adoption des énergies renouvelables en offrant plus de visibilité et des bénéfices financiers. Ces avantages peuvent encore augmenter si les projets sont situés dans des zone défavorisées.

Par ailleurs, les progrès technologiques des batteries et des onduleurs ont rendu leur coût actualisé (LCOE) très abordable alors qu’il était très cher jusqu’à présent. Ainsi, aux USA, le prix de l’électricité du réseau est en moyenne de USD 0.166 par KWh (et peut même atteindre 0.345 à Houston au Texas), tandis que l’électricité solaire coûte moitié moins (USD 0.08 USD par KWh).

Le point de bascule a déjà été atteint

Grâce à leur avantage relatif, les énergies propres ont atteint le point de bascule en 2021, date à laquelle leur part dans le mix énergétique mondial (38.5%) a atteint celle du charbon (38.6%).


Source : Ember electricity generation data, IEA Net Zero by 2050: clean includes: wind, solar, hydro, nuclear, other renewables and bioenergy, 2021

Grâce à ces bénéfices déflationnistes, on peut s’attendre à ce que le mouvement fasse rapidement boule de neige et s’accélère.

En guise de conclusion, on peut citer à nouveau Al Gore lors de la COP 27 : « L’année dernière, 90% des nouvelles capacités de production électrique installées dans le monde étaient renouvelables, parce que c’était meilleur marché presque partout. Dans deux ans, ce sera le cas partout dans le monde ».