SVB en défaut … Et maintenant ?

Quelques lignes pour revenir sur l’événement Silicon Valley Bank (SVB) plus particulièrement, et dans la même quatrième catégorie des banques US, notamment First Republic Bank, Signature Bank, PacWest Bancorp, et Alliance Bancorp :  les banques dont le total de bilan est inférieur à USD 250 milliards.

D’une session à l’autre, il nous faut bien reconnaître que la vitesse de réaction de la FED, du Trésor US et de la FDIC (Federal Deposit Insurance Corporation) et le plan d’ampleur proposé sous la forme d’une ligne Back-Stop de USD 630 milliards dimanche dernier, garantissant les déposants de SVB, sont un succès à l’heure où nous écrivons ces lignes. Les banques « restées en vie » telle que First Republic Bank est en hausse de +76% en pré-marché ce mardi 14 mars 2023. PacWest Bancorp est en hausse de +58%, Alliance Bancorp de +47%, des hausses rassurantes qui apportent un soutien aux valorisations des grandes banques US et européennes.

Nous sommes désormais loin de la panique et du « flight-to-quality » qui se sont emparés du marché des taux US comme européens, bonds du Trésor comme Swaps (sans oublier le Bitcoin et l’or en très forte hausse) qui ont plongé à 10 ans de plus de 50 bps entre vendredi et lundi. De 4% à 3.45% sur le T-notes en deux séances. Le cumul d’un sentiment haussier sur les marchés actions auquel est venu s’ajouter la perception du risque d’une crise systémique du système bancaire américain ont précipité à la baisse les rendements obligataires dans des proportions très rarement observées. Une fenêtre de « tir » de très courte durée s’est ouverte pour couvrir « des » engagements à taux variable qui est d’ores et déjà à moitié refermée aujourd’hui.

Il semble en effet que le lobbying intense, effectué par les banques de 4ème catégorie aux USA auprès de l’administration Trump, et en dépit de fortes résistances de parlementaires démocrates, ait permis des gains en matière d’exigence de fonds propres et une meilleure compétitivité, mais se révèle être la cause d’une allocation beaucoup trop pondérée du compartiment « Held-To-Maturity » (HTM) à laquelle il faut ajouter un décalage de duration dans un environnement à haute intensité de relèvement des taux directeurs. La surpondération du compartiment HTM a généré une sous-pondération du compartiment « Available For Sale » (AFS) qui s’est avéré incapable d’absorber (1) le volume de rachats et (2) les pertes liées à ces rachats. En un mot, nous pouvons retenir une mauvaise allocation et une inadéquation au regard du passif exigible. Il est stupéfiant de constater que la crise en cours relève d’un problème de riche et non d’un problème de qualité de crédit. Demain, toutes les banques nord-américaines seront régulées comme en Europe, à l’identique de la BCE des stress tests de même nature seront appliqués aux banques US, quelle que soit leur classification, leur taille.

En dépit des hausses des cours observées ce jour, de la remontée des taux sur les courbes US et Euro, nous sommes toujours très loin d’une normalisation et de retrouver les capitalisations bancaires du début du mois de mars, tant les effacements de valeurs ont été importants.  Ce que nous savons clairement c’est que les bénéficiaires de cette crise sont les banques de catégories 1, les JPM, BOA, CITI notamment qui voient les dépôts exploser, et qui d’une certaine manière se resolvabilisent. JPM gagne toujours à la fin…

Il n’en reste pas moins que l’hyper-sensibilité des marchés à tout événement de nature à mettre en doute la solidité du système bancaire mondial, US en particulier, ne fait aucun doute. La FED comme la BCE ont reçu un premier avertissement : attention à ne pas aller trop loin dans le jusque-boutisme anti-inflation car il vous en coutera fort cher ! A fortiori en prétendant que le contribuable ne paiera pas le sauvetage… On se demande qui le paiera. C’est un autre sujet, il semble très vraisemblable que les mots des banquiers centraux doivent être extrêmement mesurés lorsqu’il est question de lutte contre l’inflation et de futures perspectives haussières de forte amplitude.

Quel est notre scénario pour les hausses tant attendues des taux BCE et FED ? Nous ramenons nos prévisions à des hausses de 25 points de base pour les deux banques centrales. Le 16 pour la BCE qui se doit d’affirmer la robustesse de son système bancaire et ne saurait démontrer quelque inquiétude qui ne manquerait pas de soulever des interrogations et pourrait être à l’origine d’un sell-off. La liberté de ne rien faire serait vraisemblablement un acte de faiblesse. Idem pour la FED.

 

(Ce texte a été rédigé le 14 mars.)