Une année en dents de scie

Alors que la pause estivale touche à sa fin, il convient de réfléchir à ce qui a été l’un des environnements d’investissement les plus complexes depuis longtemps. Entre les inquiétudes sur la croissance économique, la résurgence de l’inflation et une situation géopolitique extraordinairement tendue, il y a eu très peu d’endroits sûrs où s’abriter sur les marchés financiers.

La plupart des classes d’actifs ont produit des rendements négatifs et la volatilité a connu une très forte augmentation au cours des huit derniers mois. Malgré l’un des plus forts rebonds depuis la Seconde Guerre mondiale en juillet, les marchés des actions sont toujours en forte baisse pour l’année et nous sommes entrés en territoire de bear market (marché baissier). Il en va de même pour les marchés obligataires car les taux ont nettement augmenté. Seules quelques matières premières ont progressé depuis janvier mais avec beaucoup de volatilité également. Dans ce contexte très difficile, les investisseurs restent extrêmement prudents et ont massivement réduit le risque dans la plupart des portefeuilles.

L’inflation normalise la politique monétaire

Ce qui semble très clair à ce stade, c’est que l’inflation est trop élevée et que les banques centrales vont tenter de la combattre avec leurs outils émoussés et agressifs : les taux vont continuer à augmenter et les économies occidentales vont ralentir. Il est trop tôt pour se faire une idée précise du moment où nous atteindrons le pic d’inflation et de l’effet du resserrement monétaire sur l’activité économique (quelle sera la profondeur de la récession ?). Toutefois, nous sommes déjà passés par là et, en dépit de l’environnement politique, il semble que nous vivions un cycle « normal ». C’est une bonne nouvelle car l’environnement monétaire d’après-2008 était tout sauf normal et a probablement faussé de nombreux aspects des marchés financiers. Si nous avons raison, les politiques macroprudentielles et les marchés financiers pourraient retrouver leur raison d’être. Les marchés évaluent encore le scénario le plus probable et l’ampleur du ralentissement. Cependant, nous ne pensons pas que tenter de faire des prédictions exactes soit utile aux investisseurs à long terme.

L’incertitude géopolitique complique les prévisions

La tâche de faire des prévisions significatives est aussi considérablement plus ardue dans l’environnement géopolitique actuel. On a beaucoup écrit sur la guerre en Ukraine et les intentions de M. Poutine. La vérité est que très peu de gens savent ce qui motive les dirigeants russes et que, par conséquent, la plupart des tentatives de prédire l’issue de cette crise se résument à une simple supposition. Pour notre part, nous pensons que la situation va s’envenimer jusqu’en 2023, car la Russie n’est guère incitée à faire des concessions avant de mesurer la détermination des Européens à maintenir leurs sanctions face à un hiver froid et au mécontentement de la population. Nous sommes convaincus que les marchés resteront donc volatils et principalement déterminés par le flux de nouvelles et le monde politique, jusqu’à ce qu’une solution diplomatique durable puisse être trouvée.

Le retour de la mondialisation semble peu probable

La crise ukrainienne n’est que la partie la plus aiguë d’une lutte géopolitique beaucoup plus vaste entre les démocraties libérales occidentales et le reste du monde. La Chine semble déterminée à jouer un rôle plus important sur la scène mondiale et sa position sur Taïwan risque d’agiter les commentateurs jusqu’en 2023. Avec la Russie et d’autres États non démocratiques, elle tente de fournir un modèle alternatif aux valeurs démocratiques occidentales. Nous avons vu une coalition peu structurée de gouvernements autoritaires tenter de résister aux appels à s’unir contre la Russie. Jusqu’à ce que tout cela se défasse – ce qui, selon nous, finira par arriver – il est peu probable que nous assistions à une restauration de la mondialisation ou du commerce et nous devons nous habituer à un monde plus divisé.

La solution : regarder à long terme en se concentrant sur les fondamentaux

Dans ce contexte très incertain, nous restons fidèles à notre philosophie qui consiste à investir avec conviction et à adopter une vision à long terme. Il est bon de rappeler que chaque période de l’histoire a engendré des défis et des chocs spécifiques qui ont paru insurmontables en leur temps. Toutefois, ces problèmes n’ont finalement eu que peu d’importance pour la santé financière et sont, pour la plupart, oubliés depuis longtemps. Nous sommes déjà passés par là, et la vérité est que les investisseurs qui étaient prêts à regarder au-delà des secousses ont été largement récompensés. Malgré la volatilité immédiate, le flux de nouvelles a peu d’impact sur les rendements des investissements à long terme. En fait, les investisseurs avisés ont le plus souvent obtenu leurs meilleurs résultats en plaçant leurs actifs en période de grande incertitude et nous conseillons à nos clients et amis d’adhérer à cette vision du monde contre-intuitive. Nous sommes convaincus que l’attachement à la recherche bottom-up, la construction de portefeuilles à fortes convictions et la capacité à se concentrer sur le long terme sont les ingrédients clés de rendements réguliers. C’est ce que nous espérons offrir à nos clients.

Des opportunités à saisir

Nous continuons à voir d’excellentes opportunités dans différents segments de marchés qui permettront d’obtenir des rendements significatifs si l’on est prêt à faire face à une plus grande volatilité à court terme. Tout d’abord, la transition énergétique et la transformation de nos économies vers une production à faible émission de carbone continuent de bénéficier d’un soutien très fort. Avec la signature de la loi sur la réduction de l’inflation (Inflation Reduction Act ou IRA), les Etats-Unis ont enfin engagé d’énormes ressources dans les énergies propres et notre équipe pense que cela constitue une opportunité séculaire. De même, le monde des infrastructures est la cible d’investissements massifs, ce qui rend ce secteur extrêmement attractif. Ceci, associé à ses caractéristiques intrinsèques de faible volatilité, fait du secteur des infrastructures un excellent investissement en cette période plus turbulente. Le changement profond que connaît le Japon, qui réforme sa culture d’entreprise et commence à débloquer une valeur longtemps inaccessible sur son marché des actions, est peut-être moins visible. Ce marché a disparu de la plupart des écrans radars et il était toujours facile d’être sous-pondéré. Nous pensons que ce ne sera plus le cas et que, comme toujours, les premiers arrivés feront les meilleures performances. Un argument similaire peut être avancé pour l’ensemble de l’Asie, qui se trouve à un stade complètement différent du cycle économique et où la croissance est relativement bon marché. Bien que nous ayons été précoces sur ce thème, nous continuons à penser qu’il offre une grande valeur et un risque macroéconomique moindre. Il s’agit là d’un petit aperçu de nos réflexions au sortir du marasme de l’été et nous espérons que vous apprécierez la lecture de ces idées d’investissement.