Jerome Powell et le boustrophédon

Si l’on cherche le principe guidant Jerome Powell dans sa communication avec les marchés, on peut le trouver dans le style d’écriture en boustrophédon allant de droite à gauche puis de gauche à droite. Utilisé en Grèce archaïque jusqu’en 402 av JC, ce type d’écriture s’inspirait de la marche du bœuf marquant son sillon dans un champ.

Car c’est un euphémisme de dire que le ton de la dernière conférence de presse du président de la FED après la réunion du FOMC le 31 janvier dernier fut presque à l’opposé de celui adopté lors de la conférence de presse euphorique de décembre, qui suivait un exercice beaucoup plus rigoriste en novembre.

Aucun changement significatif du contexte macroéconomique n’est pourtant à relever entre les deux dates, ni sur les créations d’emplois toujours robustes (>250K en moyenne sur les 2 derniers mois), ni sur l’inflation sous-jacente, toujours en baisse très graduelle (3,9% en décembre, 4% en novembre) mais toujours loin de l’objectif de 2%.

Sur l’importance de l’objectif des 2% d’inflation, nous avons mentionné à plusieurs reprises l’année dernière notre conviction que ni la FED ni la BCE ne dévieront de la stratégie martelée par l’intégralité des banques centrales de la zone OCDE depuis le début de la crise inflationniste :  attendre le retour durable de l’inflation sous-jacente à cet objectif strict avant de baisser les taux. Le souvenir des errements de diagnostic sur le caractère transitoire de l’inflation, maintenus jusqu’à l’automne 2021, garde encore une certaine capacité de dissuasion. Nous conservons donc notre vue plus « hawkish » que le consensus sur le calendrier de la première baisse, que nous attendons au plus tôt à la fin du premier semestre.

Depuis la clarification sous pression de Jerome Powell lors de sa conférence de presse du 31 janvier dernier sur la prochaine réunion de mars, le marché n’anticipe plus de baisse à cette échéance, mais continue en revanche d’affecter 100% de probabilité à une baisse de 25bps pour la session suivante en mai.

Nous pensons en conséquence que le regain de volatilité contenue observé depuis le début de l’année sur les taux courts et longs aux Etats-Unis et en Europe (35bps d’amplitude maximum sur les points de courbe 2 ans et 10 ans) se poursuivra à mesure que les banques centrales augmenteront la fréquence d’ajustement des anticipations du marché sur le calendrier des baisses.